Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XIV.djvu/34

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siècles (1) ». Si des rameaux infidèles, orgueilleux, et, par là même, stériles, ont été arrachés du tronc pour permettre à l’olivier sauvage, c’est-à-dire aux Gentils, d’y être greffé à leur place, ce n’est point une raison pour que la racine de l’arbre, c’est-à-dire des patriarches et des prophètes, ait pu se dessécher ; « parce que », dit Isaïe, « quand le nombre des enfants d’Israël égalerait celui des grains de sable, de la mer, un petit reste sera sauvé (2) », mais par celui dont il est dit une première fois : « Et sur le Fils de l’homme que vous avez affermi pour vous » ; et, une seconde fois : « Que votre main s’étende sur l’homme de votre droite et sur le Fils de l’homme que vous avez affermi pour vous, et nous ne nous éloignerons plus de vous ». Ce Fils de l’homme, qui est Jésus-Christ, rend parfaite la vigne sainte, en y adjoignant son petit reste, les, Apôtres, et les autres hommes d’entre les Israélites, qui ont cru, en grand nombre, au Christ-Dieu, puis la plénitude des nations : il a écarté les anciens rites, leur en a substitué de nouveaux, et ainsi se trouve vérifié le titre de ce psaume : « Pour ce qui doit être changé ».

8. Nous allons donc apporter aux Juifs des témoignages plus éclatants, et dont ils sentiront, bon gré, mal gré, toute la force. « Le temps vient », dit le Seigneur, « ou je confirmerai mon alliance avec la maison de Jacob : non selon l’alliance que j’ai faite avec leurs pères au jour où je les pris par la main pour les faire sortir de l’Égypte (3) ». La prédiction est certaine : elle n’est plus renfermée en des titres de psaumes dont l’intelligence n’est à la portée que d’un petit nombre ; tous peuvent entendre et comprendre cette voix prophétique. Une alliance nouvelle a été promise : elle devait être toute différente de celle qui avait été contractée avec le peuple d’Israël, lors de sa sortie d’Égypte. Nous appartenons à cette nouvelle alliance et elle ne nous force point d’observer les rites prescrits sous l’empire de l’ancienne : au lieu de nous reprocher l’abandon de l’antique Testament, à nous qui possédons le Nouveau promis à nos pères, pourquoi les Juifs ne reconnaissent-ils pas qu’ils sont demeurés les observateurs d’un culte devenu caduc et inutile ? Aussi, puisque, suivant ce qui est écrit au Cantique des cantiques, « le jour commence à luire, et que les ombres se dissipent (1) », le sens spirituel doit briller de tout son éclat ; le culte charnel doit finir. « Le Seigneur, Dieu des dieux, a parlé, et il a appelé la terre depuis le lever du soleil jusqu’à son couchant ». Oui, il a appelé toute la terre à une nouvelle alliance, cette terre à laquelle le Psalmiste dit ailleurs : « Chantez au Seigneur un cantique nouveau ; que toute la terre chante au Seigneur ». Dieu n’a donc point parlé comme il a fait autrefois du haut du Sinaï : alors il ne s’adressait qu’à un seul peuple d’Israël, appelé par lui du pays d’Égypte : depuis, il a appelé toute la terre à partir du lever du soleil jusqu’à son couchant. Si les Juifs voulaient comprendre cette parole du Seigneur, ils entendraient son appel et il s’en trouverait, parmi eux, à qui s’appliqueraient ces autres paroles du même psaume : « Ecoutez, mon peuple, et je vous parlerai : Israël, écoutez-moi, et je vous attesterai la vérité moi, Dieu, je suis votre Dieu. Je ne vous reprendrai point pour vos sacrifices, car vos holocaustes sont toujours devant moi. Je n’ai pas besoin de prendre des veaux de votre maison, ni des boucs de vos troupeaux, parce que toutes les bêtes des forêts m’appartiennent, aussi bien que celles qui sont répandues sur les montagnes, et les bœufs : je connais tous les oiseaux du ciel, et la beauté des champs est en ma puissance. Si j’ai faim, je ne vous le dirai pas, puisque toute la terre est à moi avec tout ce qu’elle renferme. Est-ce que je mangerai la chair des taureaux, ou boirai-je le sang des boucs ? Immolez à Dieu un sacrifice de louanges, et rendez vos veaux au Très-Haut ; invoquez-moi au jour de l’affliction, et je vous en délivrerai, et vous m’honorerez ». Ici, la transformation des sacrifices anciens est d’une évidence incontestable, car Dieu annonce qu’il ne les acceptera plus, et il impose à ses adorateurs un sacrifice de louanges : non pas, qu’en cela, il nous demande nos hommages comme s’il en avait besoin, mais parce qu’il veut faire servir à notre salut les louanges que nous lui adresserons, car voici la conclusion du psaume précité : « Le sacrifice de louange m’honorera, et c’est la voie par laquelle je lui montrerai le salut qui vient de Dieu ». Mais quel est le salut de Dieu, sinon le Fils de Dieu, le Sauveur du