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LE PRINCE

peint avec vous. Je suis saisie de peur, dit la princesse ; il faut que quelque démon l’ait apporté. — Madame, dit Abricotine, ne serait-ce point l’amour ? Si vous le croyez comme moi, j’ose vous donner un conseil, brûlons-le tout à l’heure. — Quel dommage ! dit la princesse en soupirant ; il me semble que mon cabinet ne peut être mieux orné que par ce tableau. » Elle le regardait en disant ces mots ; mais Abricotine s’opiniâtra à soutenir qu’elle devait brûler une chose qui ne pouvait être venue là que par un pouvoir magique. « Et ces paroles :

Elle est mieux dans mon cœur,

dit la princesse, les brûlerons-nous aussi ? — Il ne faut faire grâce à rien, répondit Abricotine, pas même à votre portrait. »

Elle courut sur-le-champ querir du feu. La princesse s’approcha d’une fenêtre, ne pouvant plus regarder un portrait qui faisait tant d’imapression sur son cœur ; mais Lutin ne voulant pas souffrir qu’on le brûlât, il profita de ce moment pour le prendre, et pour se sauver sans qu’elle s’en aperçût. Il était à peine sorti de son cabinet, qu’elle se tourna pour voir encore ce portrait enchanteur qui lui plaisait si fort. Quelle fut sa surprise de ne le trouver plus ? Elle cherche de tous côtés. Abricotine rentre ; elle lui demande si c’est elle qui vient de l’ôter. Elle l’assure que non ; et cette dernière aventure achève de les effrayer.

Aussitôt il cacha le portrait, et revint sur