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AU BOIS.

gner quelqu’une de ses femmes, et de l’enlever. « Ha ! s’écria le prince, je ne puis m’y résoudre, elle serait offensée d’un procédé si peu respectueux. » Becafigue ne répondit rien là-dessus, et partit.

Le bruit de son voyage prévint son arrivée, le roi et la reine en furent ravis, ils estimaient beaucoup son maître, et savaient les grandes actions du prince Guerrier ; mais ce qu’ils connaissaient encore mieux, c’était son mérite personnel, de sorte que quand ils auraient cherché dans tout l’univers un mari pour leur fille, ils n’auraient su en trouver un plus digne d’elle. On prépara un palais pour loger Becafigue, et l’on donna tous les ordres nécessaires pour que la cour parût dans la dernière magnificence.

Le roi et la reine avaient résolu que l’ambassadeur verrait Désirée ; mais la fée Tulipe vint trouver la reine, et lui dit : « Gardez-vous bien, madame de mener Becafigue chez notre enfant (c’est ainsi qu’elle nommait la princesse) ; il ne faut pas qu’il la voie sitôt, et ne consentez point à l’envoyer chez le roi qui la demande, qu’elle n’ait passé quinze ans ; car je suis assurée que si elle part plus tôt, il lui arrivera quelque malheur. » La reine embrassa la bonne Tulipe, lui promit de suivre ses conseils, et sur-le-champ elles allèrent voir la princesse.

L’ambassadeur arriva : son équipage demeura vingt-trois heures à passer, car il avait six cent mille mulets, dont les clochettes et les fers