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AU BOIS.

que je le regarde. » Il le déploya aussitôt ; le portrait, qui n’était instruit que pour parler à la princesse, dit : « Belle Desirée, vous ne pouvez imaginer avec quelle ardeur je vous attends ; venez bientôt dans notre cour l’orner des grâces qui vous rendent incomparable. » Le portrait ne dit plus rien ; le roi et la reine demeurèrent si surpris qu’ils prièrent Becafigue de le leur donner, pour le porter à la princesse ; il en fut ravi, et le remit entre leurs mains.

La reine n’avait point parlé jusqu’alors à sa fille de ce qui se passait ; elle avait même défendu aux dames qui étaient auprès d’elle de lui rien dire de l’arrivée de l’ambassadeur : elles ne lui avaient pas obéi, et la princesse savait qu’il s’agissait d’un grand mariage ; mais elle était si prudente, qu’elle n’en avait rien témoigné à sa mère. Quand elle lui montra le portrait du prince, qui parlait, et qui lui fit un compliment aussi tendre que galant, elle en fut fort surprise ; car elle n’avait rien vu d’égal à cela, et la bonne mine du prince, l’air d’esprit, la régularité de ses traits, ne l’étonnaient pas moins que ce que disait le portrait : « Seriez-vous fâchée, lui dit la reine, en riant, d’avoir un époux qui ressemblât à ce prince ? — Madame, répliqua-t-elle, ce n’est point à moi à faire un choix ; ainsi je serai toujours contente de celui que vous me destinerez. — Mais enfin, ajouta la reine, si le sort tombait sur lui, ne vous estimeriez-vous pas heureuse ? » Elle rougit, baissa les yeux, et ne répondit rien. La reine la prit entre