Page:Aulnoy - Contes des Fées (éd. Corbet), 1825.djvu/598

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il ne la quittait presque jamais : lorsqu’elle allait à la chasse, il l’accompagnait ; quand elle n’y allait point, il trouvait toujours des excuses pour se défendre de sortir. Petit Soleil et Heureux, qui étaient ses frères, lui parlaient avec moins de tendresse et de respect. Elle remarqua cette différence : elle en tint compte à Chéri, et elle l’aima plus que les autres.

À mesure qu’ils avançaient en âge, leur mutuelle tendresse augmentait : ils n’en eurent d’abord que du plaisir. « Mon tendre frère, lui disait Belle Étoile, si mes désirs suffisaient pour vous rendre heureux, vous seriez un des plus grands rois de la terre. – Hélas ! ma sœur, répliquait-il, ne m’enviez pas le bonheur que je goûte auprès de vous, je préférerais de passer une heure où vous êtes, à toute l’élévation que vous me souhaitez. » Quand elle disait la même chose à ses frères, ils lui répondaient naturellement qu’ils en seraient ravis ; et pour les éprouver davantage, elle ajoutait : « Oui, je voudrais que vous remplissiez le premier trône du monde, dussé-je ne vous voir jamais. » Ils disaient aussitôt : « Vous avez raison, ma sœur, l’un vaudrait bien mieux que l’autre.

— Vous consentiriez donc, répliquait-elle, à ne me plus voir ?

— Sans doute, disaient-ils, il nous suffirait d’apprendre quelquefois de vos nouvelles. »

Lorsqu’elle se trouvait seule, elle examinait ces différentes manières d’aimer, et elle sentait son cœur disposé tout comme les leur : car encore que Petit Soleil et Heureux lui fussent