efforts pour marier Truitonne ; elle envoyait des ambassadeurs la proposer à tous les princes dont elle connaissait le nom. Dès qu’ils arrivaient, on les congédiait brusquement. « S’il s’agissait de la princesse Florine, vous seriez reçus avec joie, leur disait-on ; mais pour Truitonne, elle peut rester vierge sans que personne s’y oppose. » À ces nouvelles, sa mère et elle s’emportaient de colère contre l’innocente princesse qu’elles persécutaient. « Quoi ! malgré sa captivité, cette arrogante nous traversera, disaient-elles ? Quel moyen de lui pardonner les mauvais tours qu’elle nous fait ? il faut qu’elle ait des correspondances secrètes dans les pays étrangers : c’est tout au moins une criminelle d’État ; traitons-la sur ce pied, et cherchons tous les moyens possibles de la convaincre.
Elles finirent leur conseil si tard, qu’il était plus de minuit lorsqu’elles résolurent de monter dans la tour pour l’interroger. Elle était avec l’Oiseau Bleu à la fenêtre, parée de ses pierreries, coiffée de ses beaux cheveux, avec un soin qui n’est pas naturel aux personnes affligées : sa chambre et son lit étaient jonchés de fleurs, et quelques pastilles d’Espagne qu’elle venait de brûler, répandaient une odeur excellente. La reine écouta à la porte : elle crut entendre chanter un air à deux parties : car Florine avait une voix presque céleste. En voici les paroles, qui lui parurent tendres :
Que notre sort est déplorable,
Et que nous souffrons de tourmens