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AU SPITZBERG.

— Vous en chargez-vous, Madame ?

— Oui, à une condition.

— Laquelle ?

— C’est que je l’accompagnerai.

— Jusqu’au bout ?

— Jusqu’au bout.

— Cela présentera des difficultés, parce que les femmes ne sont pas embarquées à bord des navires de l’État, et…

— Alors je ne dis pas un mot pour le voyage, au contraire.

— Parlez-en toujours, nous verrons à arranger la difficulté. »

Le soir même, le projet du grand voyage était mis sur le tapis entre mon mari et moi, et obtenait l’unanimité de nos deux consentements.

Le lendemain nous annonçâmes notre départ à nos amis.

Ce fut un tolle désapprobatif :

« Quelle folie ! me disait-on, vous allez revenir laide.

— Pourquoi donc ?

— Des pays affreux ; et puis vous êtes trop jeune et trop délicate pour les fatigues d’un tel voyage ; attendez, au moins.

— Non ; d’abord l’occasion ne se représenterait pas ; ensuite, plus tard, je puis avoir des enfants et n’aurai plus alors le droit d’exposer ma vie dans des aventures.

— À votre âge on va au bal et non au pôle.

— L’un n’empêche pas l’autre ; si je reviens, j’aurai tout le temps d’aller au bal.