moi avec leurs bruits formidables, si la neige m’enveloppait de ses violents tourbillons, alors il me semblait que j’entendais la voix même du Tout-Puissant, dont un souffle peut bouleverser le monde, et je me recueillais dans une muette prière.
Un jour cependant, un seul jour, il nous fut donné de voir le Spitzberg égayé : c’était le 10 août. Dès le matin, les grands rideaux de brume qui voilaient sans cesse l’horizon furent tirés comme par une main invisible, et, miracle ! le soleil, un vrai, beau, éclatant soleil apparut ; sous son influence, la baie devint admirable ! les nuages coururent dans le ciel, emportés comme de légers flocons ; les grands rochers laissèrent glisser leurs manteaux de neige ; la mer s’agita et frémit sous les glaces étincelantes qui s’y abîmaient de toutes parts : il semblait que les rayons du soleil eussent donné la vie à ce pays mort et sinistre, et que la terre entrât en travail de printemps. C’était le dégel, le dégel complet, bruyant et joyeux ; le dégel salué partout comme la fin de la saison triste. Hélas ! au Spitzberg, le dégel, le printemps, l’été, tout cela dure quelques heures ! Le lendemain même de ce beau jour, la brume obscurcit le ciel ; une sombre atmosphère fit place au jour éclatant, le froid revint plus intense, la rafale gémit lugubrement, les glaces restèrent immobiles, se soudant de nouveau aux rochers, et tout commença à se rendormir de ce sommeil glacé et funèbre qui dure plus de onze mois.
Le retour subit de l’hiver nous obligea à songer au départ ; toute tentative pour pénétrer plus au nord devenait impraticable ; quatre jours après cet aver-