Page:Aunet - Voyage d’une femme au Spitzberg, 1872.pdf/221

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
209
AU SPITZBERG.

comme les pyramides de pierre des Égyptiens dominent le désert. Sont-elles en glace pure, sont-elles en granit recouvert d’une épaisse couche de glace ? nul ne le sait ; elles apparaissent toujours immuables et éclatantes à l’œil charmé du voyageur. J’ignore si elles ont jamais été abordées. À mesure que nous revenions vers le sud, nous retrouvions un peu de vie autour de nous, les oiseaux étaient plus nombreux, quelques dauphins blancs montraient au-dessus des vagues leur dos de nacre. Le quatrième jour, nous nous vîmes entourés de baleines ; elles venaient curieusement autour de la corvette, comme pour bien examiner ce poisson inconnu plus gros qu’elles ; parfois elles s’avançaient très-près de nous, et on aurait pu les distinguer dans leurs moindres détails, si elles se fussent tenues un seul moment tranquilles ; mais ces énormes bêtes sont extrêmement agiles, nagent avec une grande rapidité, font toujours des ricochets et n’élèvent leurs têtes monstrueuses hors de l’eau que juste le temps nécessaire pour respirer ; alors on ne peut pas même les examiner, car l’eau chassée violemment par leurs évents produit deux colonnes d’une sorte de neige au milieu de laquelle elles disparaissent.

Le 18 août, pour la première fois depuis le mois de juin, le soleil quitta l’horizon, mais bien peu d’instants ; car l’aube se confondit avec le crépuscule pour former une lueur incertaine et indéfinissable. Nous marchâmes toutes voiles dehors avec un bon vent frais jusqu’au 21 ; mais alors la mer, houleuse jusque-là, devint violente et se rua sur la corvette comme elle ne l’avait pas encore fait. Nous fîmes