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VOYAGE D’UNE FEMME

tent de la toile, comme on dit. Quant aux détails, ils sont exécutés avec un fini précieux et inouï ; on pourrait compter les fils de la nappe et les points de la tapisserie. Certes, c’est un beau tableau ; pourtant il ne m’a point touchée. Pourquoi ? Peut-être avais-je les yeux trop pleins de la poétique lumière de Rembrandt !

Il ne faut pas quitter la Hollande sans avoir vu Saardam et Brouk. Saardam est une page et Brouk est une vignette de l’histoire des Pays-Bas. Cette fois, j’eus pour mon excursion le plus charmant des compagnons de voyage, le soleil. La route d’Amsterdam à Saardam est jolie et variée ; de temps en temps elle côtoie le Zuiderzée, au fond duquel on aperçoit, m’a-t-on assuré, en temps calme, les clochers et les tours d’une ville autrefois engloutie par la mer pour former cet immense golfe. Le récit appartient, je crois, plus à la légende qu’à l’histoire ; quoi qu’il en soit, en passant près de la mer, je regardai attentivement ; mais j’aperçus seulement quelque chose d’analogue à ce que vit la sœur Anne du conte, le soleil tamisant sa poudre d’or sur le dos bleu des vagues, et l’herbe de la route devenant d’une verdure plus intense sous son heureuse influence.

Si on n’allait pas à Saardam pour accomplir une sorte de pèlerinage à la maison du royal charpentier Pierre 1er de Russie, il faudrait encore y aller pour Saardam, pour voir ses maisons éparpillées dans un jardin, et ses femmes si richement et si coquettement vêtues, qui ont l’air de femmes du monde jouant à la paysanne. Le jour où j’arrivai était un dimanche, et je vis déployées de toutes parts des jupes de vieux