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VOYAGE D’UNE FEMME

puérilité ; car aucune n’aboutit jamais à rien de positif. Admettons un moment que l’origine asiatique des Finnois soit prouvée. Ils ont occupé les sommets de l’Oural. Bien. Et après ? dirai-je. Les monts Ourals avaient-ils vu les premiers d’entre eux ? On arrive toujours à cette question si obscure de déterminer quels furent les premiers peuples autochtones. Tout cela est plongé dans un mystère dont aucune main savante n’a encore soulevé le voile ; aussi, sans me casser la tête à prendre parti pour ou contre les différentes opinions, j’aime autant m’en tenir à la Genèse et supposer les Finlandais descendant comme nous de Japhet, fils de Noé ; cela est plus facile et n’est pas plus absurde que beaucoup de suppositions à l’usage des académies de province. Vers le milieu du douzième siècle, nous voyons les Finlandais apparaître dans l’histoire ; le roi de Suède, Erik le Saint, vient les conquérir, et, sous prétexte de leur apporter le christianisme, s’empare de leur pays, aidé de saint Henry (l’Anglais), ne leur laissant d’autre alternative que le baptême ou la mort. Naturellement les Finlandais vaincus se convertirent en foule ; mais pendant bien longtemps ils gardèrent dans leur cœur l’amour de leurs anciens dieux. En abjurant le paganisme, ils ne l’oublièrent pas ; à l’heure où nous parlons, ce paganisme vit encore dans leur mémoire : seulement il s’est transformé ; de religion il s’est fait poésie ; ce n’est presque pas déchoir. Les dogmes sacrés sont devenus légendes populaires ; on les chante durant les longues nuits d’hiver, quand le foyer de la ferme rassemble toute la famille. Ces poésies se nomment runas.