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AU SPITZBERG.

Autant que j’en ai pu juger par d’imparfaites traductions, ces runas racontent toute une mythologie compliquée, originale, mystérieuse et bizarre à la fois, très-différente de la mythologie scandinave. Féconde en inventions, comme l’ancienne religion des Grecs, elle place partout des dieux, dans le ciel, sur la terre, au fond de la mer ; elle anime et vivifie les métaux, les pierres, les arbres ; elle personnifie le chaud, le froid, le vent, la pluie, la neige, les saisons ; elle divinise le chien et l’ours ; elle peuple les solitudes de la Finlande d’une foule innombrable de dieux, de déesses, d’esprits, de géants, de génies, de follets, de nains, de sorciers. Les uns habitent la plaine, d’autres les marécages, ceux-ci les halliers sombres des forêts, ceux-là les cavernes de la montagne et les rochers des cataractes. Chacun de ces êtres mystérieux vit de sa vie propre et, comme dans toutes les mythologies, est agité de passions qui le font ressembler à l’homme.

Les runas racontent les aventures merveilleuses et incroyables de toutes ces divinités et les exploits d’une quantité de héros-dieux en rapport avec elles ; tout ce monde porte des noms bizarres, mal commodes à loger dans une cervelle française ; l’un d’eux pourtant, le vaillant Wanaïmoïnen, l’Odin finlandais, s’impose au souvenir par la fréquence de ses apparitions dans la légende.

On rencontre parfois dans ces récits des expressions pittoresques et délicates empreintes d’une vraie poésie ; on me traduisit un jour quelques vers d’une runa où une jeune mère nommait sa fille ma bran-