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AU SPITZBERG.

ble avoir une carte d’échantillons appliquée sur la poitrine. L’effet est laid, criard, de mauvais goût, et prouve qu’un grand sculpteur n’a pas besoin d’être un coloriste, autrement, Thorwaldsen n’eût pas permis à sa vanité d’offenser à ce point l’harmonie d’un portrait.

En quittant Thorwaldsen, notre voiture s’arrêta devant une jolie et élégante construction du dix-septième siècle : c’était le château de Rosenbourg. Ce petit château fut bâti par Christian IV.

Un mot sur Christian IV. Il fut un de ces rois que l’histoire montre grands, et dont la renommée reste pourtant à peu près circonscrite dans les limites étroites de leur royaume. Son malheur est d’avoir régné pendant cet illustre dix-septième siècle, si rempli par la France de mouvement et de splendeur, que personne ne distingua dans les brumes du Nord cette noble figure d’un héros penseur, d’un prince courageux, éclairé, économe, avare du sang de ses sujets, et, chose plus rare, avare de leurs deniers. Pendant son long règne, Christian tint souvent tête à l’Empire et à la Suède ; un moment il alla jusqu’à menacer Vienne ; un jour, il prit Calmar, défendue par Gustave-Adolphe. Doué d’une infatigable activité d’esprit, il était sans cesse occupé par les projets les plus multiples. Il fonda trois villes : Christiansand, Christianopel et Christianstad ; une colonie : Trinquebar, sur la côte de Coromandel ; il rebâtit Opslo, la capitale de la Norwége, et lui donna son nom actuel de Christiania. Il ouvrit à Copenhague des chaires publiques pour l’instruction du peuple, créa une école de pilotage indispensable aux côtes