Page:Aurel - Le nouvel art d'aimer, 1941.djvu/127

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

PARENTS
121

jour pour rectifier selon le cas une fausse interprétation ?

Lire c’est se nourrir. Que notre enfant, selon son âge ait toujours sur sa table de nuit, un livre de vigueur, un livre de penseur ou un poète choisi par nous, à lire trente minutes avant de s’endormir et cela peut suffire. Qu’il nous rende le livre sitôt qu’il l’a fini pour en avoir un autre.

Et accueillons
ses directives pour le choix du volume qui marquera ses goûts, indices de sa vocation.


Mais encore, diront les parents,
que lui donner à lire ? Tant d’écrivains sont si hasardeux, si précaires. Ils font des effets, des jeux d’esprit souvent. Certains sont dangereux ou pessimistes noirs. Que fera par exemple un garçon de quinze ans du mot de Talleyrand : « Méfiez-vous du premier mouvement. Il est presque toujours bon. »

Le mot sera neutralisé, parents, comme virus dans le cœur de l’enfant que vous avez ouvert à la droiture, quand vous lui aurez dit : « Talleyrand là parle en politique, comme Machiavel quand il dit : « La fin veut les moyens. » Il te parle de la fatalité des peuples, des moyens de juguler l’agresseur puisque l’ogre est toujours possible. Il ne te parle pas du bien, du mal ni de la conscience, mais de l’habileté à te défendre contre qui veut te dépouiller. Car là il te faut faire face et ne pas t’aviser de prendre la désertion pour une vertu. C’est un autre jour que tu seras édifiant. Aujourd’hui garde à toi. »

Les parents sont ici les rectificatifs du vrai sitôt qu’il est nocif dans une âme trop tendre.