Page:Austen - La Famille Elliot T2.djvu/109

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cessé de l’aimer, ou il a découvert qu’elle ne l’aimait pas. Elle ne pouvait supporter la pensée de trahison ou de légèreté, d’aucun mauvais procédé entre lui et son amie ; qu’il eût à se plaindre d’elle ou elle de lui était une idée également désespérante. Le capitaine Bentick et Louisa Musgrove lui avaient paru si différens l’un de l’autre, si opposés de caractère, de conduite, de sentimens, qu’il ne lui était jamais venu dans l’esprit qu’ils pussent se rapprocher : l’insouciante, la folâtre, l’étourdie Louisa Musgrove, toujours causant, riant, sautant ; et le triste et sensible Bentick, toujours soupirant, réfléchissant ou lisant. Quelle sympathie les avait entraînés assez puissamment pour leur faire oublier si vite, l’une, le charmant Frederich, et l’autre cette femme si adorée et tant regrettée ? La réponse se présenta d’elle-même : « Ce sont la situation et les circonstances qui décident plus souvent qu’on ne pense du sort des humains ; l’accident de Louisa les avait placés sous le même toit pendant plusieurs semaines, dans une maison si étroite, qu’il fallait absolument se réunir. » Bentick céda au premier moment sa chambre à la malade, en y laissant tous ses effets et ses livres ; ce fut une occasion d’y ren-