Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/236

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à Londres ? Enfin, tout ce que je puis dire, c’est que sa conduite est celle d’un malhonnête homme, et je ne pense pas que désormais on puisse espérer de les voir unis. Je n’entends rien dire de son retour à Netherfield ; cependant j’ai questionné, à ce sujet, tous ceux qui auraient pu le savoir.

— Je doute qu’il revienne jamais à Netherfield.

— Tant mieux pour lui, personne ne désire le revoir ; mais, moi, je dirai toujours qu’il s’est bien mal conduit avec ma fille, et si j’avais été elle, je ne l’eusse point souffert… Enfin, ma consolation est qu’Hélen en mourra de chagrin, et alors il se repentira d’en avoir agi ainsi avec elle. »

Cette attente ne paraissant pas fort consolante à Élisabeth, elle ne fit nulle réponse.

« Eh bien ! Lizzy, continua sa mère quelques instants après, les Colins sont donc heureux ensemble ? J’espère que cela durera : tiennent-ils une bonne table ? Je ne doute point que Charlotte ne soit une excellente ménagère ; si elle ressemble à lady Lucas, elle doit être furieusement économe. Ils ne jettent point l’argent par les fenêtres, je présume ?

— Non, leur maison est tenue avec beaucoup d’ordre.

— Oh ! avec ordre, je le crois facilement ; Charlotte a été à bonne école pour cela… enfin grand bien lui fasse… ils parlent sans doute souvent de ce qu’ils feront à la mort de votre père ; ils regardent, je suppose, la terre de Longbourn comme si déjà elle leur appartenait ?

— C’est un sujet sur lequel ils ne pouvaient s’entretenir en ma présence.

— Non, cela eût été assez singulier… Mais je ne doute point qu’ils n’en parlent souvent ensemble. Enfin, s’ils peuvent posséder sans remords une terre si illégalement acquise, tant mieux pour eux ; quant à moi, j’aurais honte d’avoir un bien par substitution. »