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Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/255

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pouvait faire ! Elle en fit la réflexion, et debout devant cette toile sur laquelle il était représenté, fixant les yeux sur les siens elle pensait à son attachement avec un plus vif sentiment de gratitude que ce souvenir ne lui avait encore inspiré, et oubliant alors le mode de cette déclaration qui naguère l’offensait tant, ne songeant plus qu’à ce qui pouvait accroître son estime pour lui.

Lorsqu’ils eurent parcouru toute la maison, ils redescendirent l’escalier, et prenant congé de la femme de charge, furent confiés au soin du jardinier, qui les rencontra à la porte du vestibule.

Comme ils traversaient la pelouse, pour se rendre à la rivière, Élisabeth se détourna, pour regarder encore le château ; son oncle et sa tante s’arrêtèrent aussi ; tandis que celui-ci formait quelques conjectures sur la date du bâtiment, le propriétaire lui-même parut soudain, au détour de la route qui conduisait aux écuries.

Il n’était qu’à peu de distance, et son apparition fut si subite qu’il était impossible d’éviter sa vue. Ses yeux rencontrèrent ceux d’Élisabeth ; la plus vive rougeur vint déceler leur embarras. M. Darcy tressaillit et parut quelques instants immobile d’étonnement, mais se remettant bientôt, il s’avança vers les voyageurs et adressa la parole à Élisabeth, sinon d’un air fort calme du moins avec une parfaite politesse.

Elle s’était détournée presque involontairement, mais s’arrêtant, et comme il approchait, elle reçut ses compliments avec un embarras qu’il lui fut impossible de vaincre. Si la parfaite ressemblance de Darcy avec le portrait que les deux autres venaient d’examiner, avait été insuffisante pour les convaincre que c’était lui qu’ils voyaient en ce moment, la surprise témoignée par le jardinier en apercevant son maître, le leur aurait bientôt appris ; ils se tinrent un peu à l’écart comme il parlait à leur nièce, qui, confuse et étonnée, osait à peine lever les yeux, et ne savait quelles réponses faire aux demandes polies qu’il lui adressait sur sa famille. Ses manières, si différentes de ce qu’elle les avait vues autrefois, la rendaient toute surprise ; chaque