Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/70

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— Quoiqu’il soit difficile, dit Hélen, de deviner de quelle manière il peut nous dédommager de la perte d’un bien qu’il croit légitimement à nous, le désir qu’il en a est certainement à son avantage. »

Élisabeth était principalement frappée de son extrême déférence pour lady Catherine, et de sa bonne intention de baptiser, de marier et d’enterrer ses paroissiens lorsqu’il en serait requis.

« Il faut, dit-elle, que ce soit un plaisant original, je me le figure à son style ; quel galimathias ! Que veut-il nous dire avec ses excuses d’être l’héritier de Longbourn ? Nous ne pensons pas qu’il voulût s’en dispenser s’il le pouvait… Le croyez-vous, mon père, un homme bien sensé ?

— Non, ma chère, je ne le crois pas ; je m’attends bien à le trouver tout le contraire. Il y a dans sa lettre un mélange de bassesse et de suffisance qui promet beaucoup… Je suis impatient de le connaître !

— Son style, dit Mary, me paraît assez beau : la branche d’olivier n’est pas une idée neuve, mais il faut convenir qu’elle est heureusement appliquée. »

Ni la lettre ni l’écrivain n’intéressèrent Catherine et Lydia ; il était impossible que leur cousin portât un habit rouge, aussi ne les occupa-t-il guère.

Quant à Mme Bennet, les expressions de M. Colins avaient dissipé sa mauvaise humeur, et elle attendit sa visite avec une tranquillité qui étonna également son mari et ses filles.

M. Colins arriva à l’heure marquée, et fut reçu par toute la famille avec beaucoup de politesses. M. Bennet, il est vrai, parla peu ; mais les dames étaient très disposées à causer, et M. Colins ne semblait pas avoir besoin d’encouragement ni aucune envie de se taire… Quelques moments après s’être assis, il fit compliment à Mme Bennet sur la beauté de ses filles, disant avoir beaucoup entendu parler d’elles et célébrer leurs charmes ; mais, dans cette occurrence, la vérité lui semblait fort au-dessus de la renommée, et il ajouta qu’il ne doutait nullement qu’elle ne les vît toutes bien mariées.