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Un jour, on descendit sur la place publique,
On avait, disait-on, fondé la république ;
Pierre et Paul, ce jour-là, jurèrent des deux mains
De vivre et de mourir en vrais républicains.
Ce gouvernement-là c’était leur rêverie.
Pour eux, c’était le bien de la mère-patrie,
Ils aimaient tant la France !… Et comprenez-vous ça ?
Pierre est mort à Cayenne, et Paul à Lambessa !

Il me disaient souvent : « Ne travaille plus, père !
» Avec nous tu n’as pas à craindre la misère :
» Nous sommes jeunes, nous ; repose tes vieux bras ;
» Ta tâche est largement accomplie ici-bas ;
» Nos poignets vigoureux conduiront la charrue,
» Et toi, chez nous, assis sur le banc de la rue,
» Tu pourras nous attendre… » Et comprenez-vous ça ?
Pierre est mort à Cayenne et Paul à Lambessa !

Un soir, le tambour bat, on sonne, on crie ; Aux armes !
La voix du vieux tocsin semblait pleine de larmes…
Un prince violait la constitution :
En décembre, en plein jour, devant la nation.
Ah ! l’indignation souleva les poitrines ;
Ils partirent tous deux, avec leurs carabines,
Pour faire leur devoir… Et, comprenez-vous ça ?
Pierre est mort à Cayenne et Paul à Lambessa !

Et moi, j’attends la mort, je suis las de l’attendre…
Du haut du ciel, parfois, la nuit, je crois entendre