Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/118

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Une conversation tenue au collége d’Harcourt entre Duclos, madame d’Épinay et Linant, le précepteur de son fils, donne un aperçu de l’idée qu’on se faisait alors de l’éducation : « Revenons, dit Duclos à Linant, à l’emploi de votre temps, vous suivez les classes ? — Sans doute, Monsieur, que peut-on faire de mieux ? — Tout le contraire de ce que vous faites, Monsieur, car tout cela ne vaut pas le diable ; et ici quelle lecture ? — Monsieur nous expliquons ensemble le Selectæ. — Encore du latin !… Les lectures ? — Un peu d’Imitation de Jésus-Christ et une fois par semaine la Henriade de Voltaire. — Je vous avoue, répond madame d’Épinay, intervenant[1], que ce plan ne me plaît point. Je ne vois point de but à tout cela. — Vous avez raison, dit Duclos. Pas de latin, très-peu de latin ; point de grec surtout, que je n’en entende point parler. Je ne veux en faire ni un sot, ni un savant. Il y a un milieu à tout cela qu’il faut prendre. — Mais, Monsieur, dit Linant, il faut qu’il connaisse les auteurs et une légère teinture du grec ne peut… — Que diable venez-vous nous chanter ? De quoi cela avancera-t-il, votre grec ? Il y a là une cinquantaine de vieux radoteurs qui n’ont d’autre mérite que d’être vieux et qui ont perdu les meil-

    comme il s’en trouverait à peine un seul sur cinq cents ; au lieu que le vrai représentant de la généralité des enfants, n’est ni un imbécile, ni un aigle. »

  1. Madame d’Épinay fit, pendant son séjour à Genève, sous le titre de Conversations d’Émilie, un traité d’éducation auquel l’Académie française décerna, en 1783, le prix d’utilité.