Page:Avezac-Lavigne - Diderot et la Société du baron d’Holbach, 1875.djvu/73

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à Diderot, mais s’il fut un moment abattu, il ne perdit pas courage. Il répondait à Voltaire, qui lui conseillait d’imiter son collègue : « Abandonner l’ouvrage, n’est-ce pas tourner le dos sur la brèche, n’est-ce pas faire ce que désirent les coquins qui nous persécutent ? et si nous finissons, ne sommes-nous pas bien vengés ? » Mais Voltaire avait d’autres vues qu’il croyait plus politiques et plus habiles « que M. Diderot, écrivait-il à d’Argental. M. d’Alembert, M. de Jaucourt et l’auteur de l’excellent article de la génération[1], déclarent qu’ils ne travailleront plus si on ne leur rend justice, si on leur donne des réviseurs mal intentionnés, et je vois évidemment que la voix du public, qui est la plus puissante des protections, mettra ceux qui enseignent la nation sur le trône des lettres où ils doivent être… Tout le malheur vient de ce que M. Diderot n’a pas fait d’abord la même déclaration que M. d’Alembert. »

Voltaire était trop éloigné de Paris pour bien apprécier la situation. Il se trompait sur les dispositions de la Cour à l’égard des philosophes, et particulièrement sur celles de madame de Pompadour et de M. de Choiseul ; cependant, d’Alembert lui avait fait certaines révélations qui auraient dû le mettre au courant de ce qui se passait. Le 15 février 1758, il lui écrivait : « Vous me demandez si Monsieur et Madame une telle[2] ne nous protégent pas. Pauvre républicain que vous êtes ! Si vous saviez de quel

  1. Le fameux Haller.
  2. Madame de Pompadour et M. de Choiseul.