Page:Avril de Sainte-Croix - Le Feminisme.djvu/12

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qu’aucune éducation n’avait formées, qu’avaient pourries, bien vite, le mauvais désir de l’homme, le besoin, puis le goût de l’argent ».

Aux questions que leur posait le chef de bureau, elles répondaient d’un air las. Et leurs sourdes révoltes étaient moins terribles encore que leurs résignations mornes. À celles qui semblaient capables de se raccrocher sur la pente, qui ne voulaient pas sombrer irrémédiablement, M. H. conseillait chaque fois :

— Allez voir, Mme Avril de Sainte-Croix, Œuvre libératrice, rue Boileau, n° 94.

Elles remerciaient, sortaient en hochant la tête.

Et, j’eus à mon tour, l’idée d’aller voir Mme Avril de Sainte-Croix. Cette œuvre libératrice, qu’elle était-elle donc ?

Je connaissais la vaillante qui l’avait fondée, la féministe éminente dont le Conseil National des Femmes Françaises a fait l’une de ses déléguées au Conseil International, l’être de charme et de bonté qui, depuis toujours, met au service des opprimés son énergie souriante, l’apostolat de son esprit si droit, si net, de son cœur chaleureux. Souvent, dans telle commission où l’on discutait législation nouvelle, ou bien quand il s’agissait de soulager quelque souffrance, j’avais admiré son ardeur de justice, son inlassable zèle…Mais je ne connaissais pas sa maison.

Un après-midi de printemps, quand verdissaient les feuillages d’Auteuil, je m’en allais vers le pavillon caché dans les lilas. J’y trouvais des chambres claires, une familiale salle à manger, et, dans une pièce ouverte sur le lumineux jardin, une dizaine de fem-