Page:Béranger - Ma biographie.djvu/114

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à se montrer infidèle[1]. Sans compter qu’on court le risque de fausser son talent, la sincérité des sentiments en étant toujours l’appui le plus solide. Je ne suis pas de ceux qui pensent que le poëte remplit aujourd’hui un sacerdoce. Loin de moi un tel anachronisme ; mais, pour n’être guère plus qu’un objet de luxe dans le monde actuel, le poëte n’en doit pas moins tâcher d’offrir assez d’unité morale pour que sa bonne foi ne puisse être mise en doute dans les opinions qu’il veut servir et propager.

Pour parler rapidement de quelques-uns de mes premiers essais, je dirai que j’eus l’idée d’un poëme sur Clovis, où je voulais montrer l’épiscopat gaulois l’aidant à fonder notre vieil empire. Je terminai presque un poëme pastoral, dont le sujet touchait à l’époque de Jeanne d’Arc, et bon nombre d’idylles en rapport avec les mœurs modernes. J’essayai aussi plusieurs comédies dont deux en cinq actes ; il y en avait une entre autres sur ou contre les savants (à qui il m’est souvent arrivé de manquer de respect, malgré mon respect pour la science), et une autre intitulée les Hermaphrodites, titre bizarre, sous lequel je peignais des hommes efféminés, reste de l’ancien régime, et des femmes

  1. Chateaubriand même, de combien d’hérésies on le peut accuser ! (Note de Béranger.)