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Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/119

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Les Hellènes réclamaient de leurs orateurs, comme de leurs poètes, d’autres musiques analogues. Il était un distique célèbre que les Anciens citaient pareillement ; c’était l’inscription de la statue de l’athlète crotoniate Phaülos,

Pent’ epi pentèkonta podas pèdèsé Phaülos.

Toute la Grèce connaissait de même le fameux brocard sur un médecin d’Agrigente, nommé Akron :

Akron’ iatron akron Akragantinôn.

On admirait, on vantait, — on introduisait parfois, — dans les vers du Poète ces prouesses de lettres, ces jeux ironiques, étymologiques ou simplement sonores de syllabes et de mots, — pour mieux dire : ces rimes et calembours, — et l’on y cherchait toutes les sonorités sensibles ou secrètes. Tel vers de l’Iliade (chant I, 530) passait pour avoir l’harmonie la plus expressive : nos oreilles d’aujourd’hui sont incapables de la saisir. Tel vers de l’Odyssée (chant X, 251) passait pour le modèle d’une « eurythmie », qui nous échappe pareillement. Mais dans la même Odyssée, nous sentons encore la musique sauvage de tels vers (chant IX, 70-71), qui parlent autant à nos oreilles qu’à notre esprit : nous entendons, dans la tempête obscure, la