Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/124

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’un ou l’autre doit être un dactyle, et l’hexamètre admet le dactyle partout, sauf au sixième, qui doit être un spondée.

Les deux longues de spondées trop nombreux donneraient une lourdeur et une monotonie que corrige heureusement un mélange de dactyles. Inversement, le dactyle continu donnerait au vers une allure sautillante et trop légère à laquelle le mélange de spondées rend du poids et de la dignité. Le spondée est facile à trouver dans la langue où les mots spondaïques abondent. Le dactyle, au contraire, demande une recherche où souvent la patience et l’ingéniosité échouent : il n’est pas inutile de violenter parfois le langage courant pour « attraper » le dactyle : tous les bacheliers de ma génération, faiseurs de vers latins, ont pratiqué cette chasse ; nos poètes français en usent-ils autrement avec la rime ?

Dans la diction épique[1], la recherche du dactyle a visiblement incliné, vers certaines formes plus commodes, non seulement le vocabulaire, le style et l’orthographe du texte, mais encore la déclinaison des noms, la con-

  1. « La langue de l’épos, dit M. K. Witte, est fille de l’hexamètre, die Sprache des grieschischen Epos ist ein Gebilde des Hexameters ». L’hexamètre l’a créée et, durant des siècles, l’a maintenue vivante, puis l’a conservée jusqu’à nous dans un texte fidèlement transmis. Du xe siècle avant notre ère aux xiiie et xive siècles après J.-C., durant deux mille trois cents ou quatre cents années, il s’est trouvé des poètes ou des versificateurs pour s’en servir en leurs compositions homériques ; l’ambition de tous les Hellènes païens ou chrétiens, d’Europe ou d’Asie, durant deux millénaires, fut de montrer qu’ils en savaient le maniement.