Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/219

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d’Égypte, au goût de cette grécité levantine de l’Empire, pour qui les recettes magiques et les invocations infernales étaient le dernier mot de la science, le remède à toutes les inquiétudes et à tous les maux. Il est beau sans doute que, cinq siècles après les Alexandrins, un savant, un lettré, un architecte de la Bibliothèque Impériale se soit laissé prendre à de pareilles homériqueries. Mais il me semble encore plus beau qu’une supercherie aussi grossière ait pu trouver l’entrée de la bibliothèque publique dans cette Nysa de Carie, où Strabon, deux cents ans plus tôt, était venu écouter les leçons d’Aristodème, fils de ce Ménécrate, qui avait été le disciple direct du plus grand, du plus célèbre des homérisants, d’Aristarque lui-même.

Ne voilà-t-il pas de quoi nous faire réfléchir sur les traitements que les Poésies ont pu, ont dû subir à travers l’hellénisme d’Asie, des Iles, de Grèce, de Grande-Grèce, du Levant et de l’Occident, surtout dans le Far-West des colonies italiotes et siciliennes, durant les quatre ou cinq siècles antérieurs aux Critiques d’Alexandrie ? Et ne voilà-t-il pas de quoi rendre vraisemblables tous les soupçons soit de ces Alexandrins eux-mêmes, soit de nos éditeurs et critiques modernes ?

Quelque profonde que soit notre ignorance de cette Grèce archaïque, je crois qu’une