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rent les Prolégomènes tronqués. C’est dans l’édition de luxe de 1804-1807 que parut la Préface qui en est la fin. Wolf traite en cette Préface de la méthode critique et des règles de correction qui permettront de rétablir le texte d’Homère : voilà bien le troisième sujet que nous annonçait le titre des Prolégomènes. Or, quand on lit bout à bout les Prolégomènes de 1795 et la Préface de 1804, on a le sentiment très net, — une fois sauté le trou, le grand trou qui les sépare, — que la seconde est du même ton, du même tissu que les premiers : divisions et transitions sont les mêmes ; mêmes phrases parfois et, surtout, même façon de beaucoup annoncer et de toujours renvoyer au lendemain la tenue des promesses. « Je reviens, dit la Préface, au tracé des bornes et lois de la critique homérique... » Et Wolf commence de donner les règles et quelques exemples d’une saine correction ; esquissant même une philosophie de la connaissance des textes et de leur recension, il traite du faux, du vrai et du vraisemblable, avec une netteté de logique et une fermeté de mots, dont ses autres chapitres ne donnent pas toujours le modèle. Il nous prévient, d’ailleurs, que depuis longtemps il observait lui-même ces règles critiques, sans les avoir énoncées, quae jam olim tacite observavi. S’il les énonce aujourd’hui, c’est en les empruntant en grande partie à l’illustre maître de la critique sacrée, Jean-Jacques Griesbach[1].

Retenons l’aveu : Wolf assurément connaissait et pratiquait depuis toujours les règles d’une saine critique ; mais, pour les esquisser dans la troisième partie de ses

  1. Kleine Schriften, I, p. 252 : quod quoniam necesse est spectari in omni correctione scriptorum quae fidem historicam spectatur, breviter exponam ea quae jam olim tacite observavi, magnam partem ex iis, quae praeclarus auctor Criticae sacrae Griesbachius instituit, ad has uberiores litteras translata. Le traité de J. J. Griesbach, paru à Halle en 1768, avait pour titre : De Fide historica ex ipsa Rerum quae narrantur Natura judicanda.