Page:Bérard - Un mensonge de la science allemande, 1917.djvu/52

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la mode ancienne croyaient en Homère, en son génie, en sa présence réelle dans tout ou partie des poèmes qui portent son nom. Grâce à quelques Allemands, mais surtout à des Français et des Anglais du xixe siècle, cette école a subsisté jusqu’à nous : les Boissonnade et les Georg Lange, les Edgar Quinet et les Otfried Müller, les Wilhelm Nitzsch et les Frédéric Ozanam, plus près de nous les Gladstone et les Henri Weil, les Georges Perrot et les Munro sont restés, en pleine tourmente philologique, les continuateurs de la tradition grecque et romaine ; le vingtième siècle commence de leur rendre une justice qu’ils n’ont pas toujours connue de leur vivant ; la « réaction » d’esthétisme littéraire, qui souffle en ce moment dans les études homériques, et le mouvement « néo-unitaire », qui va lui succéder, ne sont que des renouveaux du classicisme d’autrefois.

La critique moderne a commencé pour Homère le jour où l’on nia, avec des arguments à l’appui, qu’Homère eût jamais existé et que les poèmes homériques en leur ensemble eussent été composés par un artiste conscient de son entreprise et maître de son métier. Tel fut, durant les trois ou quatre générations dernières, l’idée autour de laquelle se ralliaient les critiques modernes. Au service de cette idée, ils mettaient les derniers résultats de leurs études historiques et de telle ou telle science dont la mode régnait. A certains moments, ce fut à la philologie classique, entendue au sens le plus large, — c’est-à-dire: à l’ensemble des études qui traitent de la langue, des textes et des littératures de l’antiquité, — que l’on demanda les arguments principaux. A d’autres moments, ce fut à l’histoire comparée des littératures, en particulier à la comparaison des poèmes épiques à travers le monde et les générations. Plus près de nous, les fouilles des Schliemann, des Dörpfeld et des Evans donnèrent à l’archéologie la déci-