Page:Bérard - Un mensonge de la science allemande, 1917.djvu/56

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que nous avons admirée courtoisement dès qu’elle est venue d’outre-Rhin comme une étrangère qui nous demandait l’hospitalité. »

Depuis onze ans que cette citation de Rigault a paru dans les Neue Jahrbücher, comme dernière conclusion de Georg Finsler, aucun des innombrables lecteurs de cette revue mondialement réputée n’a contredit l’érudit de Berne ni le littérateur de Paris. En 1912, Georg Finsler a donc pu fonder sur ces solides prémisses son jugement définitif : « L’abbé d’Aubignac est le père de la critique homérique chez les Modernes. Il est vrai que son livre des Conjectures académiques ne fut pas honoré d’un regard à son apparition ; mais, par la suite, il a eu sur la philologie allemande une influence à longue portée. Son hypothèse, qui admet des poèmes homériques isolés, a été connue de Herder et coïncide avec la théorie de ce dernier sur l’improvisation des chants homériques. Heyne, en son histoire de la formation de l’Iliade, ne se sépare de d’Aubignac que sur un point : l’importance plus grande qu’il attribue à l’activité poétique du compilateur. Wolf, qui juge d’Aubignac d’une façon sciemment injuste, trahit par là même qu’il lui devait plus que sa vanité ne lui permettait de l’avouer : il devra s’entendre dire par Cesarotti qu’il a fait sienne l’hérésie de d’Aubignac, en n’y ajoutant qu’un appareil plus rigoureux de preuves. Zoega, enfin, s’inspire directement de d’Aubignac, et Zoega, à son tour, a influé directement sur Welcker[1]. »

  1. G. Finsler, Homer in der Neuzeit, p. 210 : « d’Aubignac ist der Vater der modernen Homerkritik. Zwar wurde sein Buch bei seinem Erscheinen keines Blickes gewürdigt ; aber auf die deutsche Wissenschaft hat es einen weittragenden Einfluss aufgeübt. Mit seiner Annahme von Einzelgedichten, deckt sich die Vorstellung Herders, der ihn kennt, dass die homerischen Gediche Impromptus gewesen seien. Heyne weicht von ihm in der Entstehungsgeschichte der Ilias nur darin ab, dass er dem Kompilator ein vielgrösseres Mass von poetischer Betätigung zuschrieb. Wolf hat in wissentlich falscher Weise über ihn berichtet und dadurch verraten dass er ihm mehr verdankt als seine Eitelkeit ihm erlaubte zu zugestehen : er hat sich dafür von Cesarotti sagen lassen müssen, er habe d’Aubignac’s Ketzerei mit strengerer Beweisführung zur seinigen gemacht. Zoega endlich, der dann auf Welcker gewirkt hat, ist von d’Aubignac direkt angeregt gewesen. » Il est un problème que je n’aborde pas ici : c’est l’origine des pensées de Giambista Vico sur le même sujet. On sait que Vico exposait en 1722, sept ans après l’apparition des Conjectures, des idées analogues à celles de d’Aubignac. Mais Vico n’ayant pas été connu de Wolf, je ne m’en occuperai pas ici.