tems auquel ils me furent communiqués ; ils étoient véritablement de l’abbé d’Aubignac ; mais ils se sentoient fort de cette imbécillité dans laquelle on a dit qu’était tombé leur auteur ; c’étoit un manuscrit in-4o, dont on auroit pu faire un juste in-12 de 300 pages. »
C’est dans l’édition de La Monnoie que Wolf a lu les Jugemens d’A. Baillet : pour déconsidérer les Conjectures, il n’a eu qu’à mettre en son latin de Germanie ce que Bolaeus avait dit en son français courtois, ce que La Monnoie avait répété de façon plus injurieuse, et les « songeries, folies, inepties, deliramenta, somnia, ineptiae » de d’Aubignac furent acquises à l’histoire. Louis-Épagomène Viguier les reprit de Wolf pour les introduire dans la Biographie Michaud ; de là, passèrent dans les conversations de tout le monde « les impertinentes propositions avancées par l’abbé d’Aubignac ». Parmi les lecteurs français des Conjectures, un seul, Hippolyte Rigault, leur a rendu pleine justice ; les autres, et ceux-là même qui mesuraient la valeur des idées de d’Aubignac et la criante injustice de Boileau, ont continué d’accréditer la légende : « Si l’on eût écouté les idées qui germèrent dans le cerveau demi-malade de l’abbé d’Aubignac, — écrivait E. Egger dans son Histoire de l’Hellénisme en France[1], — si l’on n’eût pas traité de folies ses Conjectures académiques, quelle révolution dans les idées historiques et le goût ! » Aujourd’hui encore, cette Histoire de l’Hellénisme jouit d’une telle autorité que MM. A. et M. Croiset dans la troisième édition de leur Histoire de la Littérature grecque (1910, p. 186) empruntent à E. Egger un jugement qu’ils croient pleinement équitable : « Dès le xvie siècle, Scaliger doutait de l’unité des compositions homériques. À la fin du
- ↑ II, 192-193 ; cf. du même auteur Mémoires de Littérature ancienne (1862), p. 30 et suivantes.