Page:Bachelet - Dezobry - Dictionnaire général des lettres, des beaux-arts et des sciences morales et politiques.djvu/118

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
AME
AMÉ
110

Platon, où les idées de métempsycose supposaient nécessairement la croyance à l’âme des bètes ; soit dans le péripatétisme, les textes les plus formels d’Aristote étal issant qu’il considérait l’animal, ainsi que l’homme, comme Pentéléchie (V. ce mot) formée par l’union d’une ame et d’un corps, comme doué, non pas, il est vrai, de raison, mais de sensibilité et parfois d’intelligence (co qui s’accorde assez aisément avec son opinion sur la multiplicité des àmes) ; soit enfin chez les stoïciens, qui regardaient tout être comme le résultat de l’union d’une partie de la matière avec la grande ame du monde (V. Ana nu means). Il va sans dire que les systèmes qui, même dans l’homme, ne jugent pas l’âme essentiellement différente du corps, se trouvent ici hors de cause. Au contraire, c’est au sein du spiritualisme, c’est dans la philosophie de Descartes qu’est née, ou tout au moins que s’est développée avec éclat, l’opinion qui refuse absolument aux bètes l’intelligence et la sensibilité, pour les réduire à la condition de simples machines, d’automates formés avec un art divin. Toutefois, avant Descartes, Gomez Pereira, médecin espagnol, avait avancé la même opinion dans le livre intitulé : Antoniana Margarita, publié en 1554. D’un autre côté, le paradoxe contraire, à savoir, que non-seulement les bètes sont raisonnables, mais qu’elles se servent de la raison mieux que l’homme, avait été souten’u par Jérôme Ilorarius dans un ouvrage composé au milieu du xvi’siècle, mais qui ne fut publié qu’en 1648. Il est plus que vraisemblable, cependant, que Descartes ne prit qu’en lui-même les motifs de son opinion relativement å. l’àme des bètes ; et, en tout cas, ce fut lui qui la rendit populaire. Conçue de longue date, communiquée a quelques amis longtemps avant que Descartes eut rien écrit, positivement exprimée dans la 5° partie du Discours de la Méthode, soutenue à. diverses reprises dans ses Lettres, cette op inion acquit parmi les partisans de’la philosophie cartésienne ’ une vogue extraordinaire, en même temps qu’elle souleva, de la part de ses adversaires, une foule d’objections et de réfutations. On trouve dans le Dictionnaire historique et critique de Bayle (art. Pereira et Rorarius) et dans l’Encyclopédie de’Diderot et Dalembert (art. Ame des Bétes) l*histori ne com let de ce débat, les principaux arguments <1 P

invoqués de part et d’autre, et l’indication très-étendue › des écrits anciens et modernes qui s’y rapportent. Bornons-nous a dire que ce qui rendait les cartésiens si favorables à l’hypothèse des animaux machines, c’est qu’ils y voyaient le moyen d’échapper aux deux difficultés suivantes : 1° si les animaux ont une ame de même nature que Paine humaine, cette ame doit être immortelle comme celle des hommes, ou bien celle des hommes doit périr comme elle ; 2° sous un Dieu juste, il serait contradictoire que les bètes fussent exposées comme elles le sont, si on les suppose douées d’une ame, à des souffrances qu’elles n’ont pas méritées, et dont elles ne devraient pas être dédommagées dans une autre vie. -Mais, en réalité, rien n’est moins prouvé, ni moins susceptible de l’être, que l’espèce de dilemme auquel les cartésiens semblent avoir été si désireux d’échapper. Que les bètes aient une ame, que cette âme soit une substance simple comme l’àme humaine, cela ne prouve pas qu’elle est nécessairement immortelle, mais seulement qu’elle ne pérít pas de la même manière que le corps, par la dissolution des parties. La volonté divine est la seule cause å laquelle on puisse légitimement rapporter la conservation de l’existence chez les êtres créés ; et il est d’autant plus étonnant que les cartésiens aient méconnu cette vérité, que c’est au moins une de leurs tendances de considérer la conservation des êtres comme une création continue. La question revient donc à chercher s’il y a des raisons suffisantes de croire que Dieu conserve l’être a l’ame humaine et ne la conserve pas à celle des animaux, lorsque le corps subit la loi de la mort. Or, à la 2° difficulté, tirée des souffrances des animaux, on a répondu, à bon droit selon nous, que le principe invoqué n’est fait que pour les créatures raisonnables, capables de mérite et de démérite ; qu’en réalité les animaux, à. ce compte, ne méritent pas plus le plaisir que la souffrance, et que d’ailleurs nous ne devons juger, ni de leurs plaisirs, ni de leurs souffrances, par analogie avec les nôtres. — En somme on croit n’il y a, chez les animaux en général, - » Q

un principe différent du corps et du principe de la vie organique ; principe de quelques sensations sourdes et obscures chez les espèces inférieures ; principe de sensations très-nettes et très-vives, et aussi de perceptions, de souvenirs, d’associations d’idées, qui présentent quelquefois les apparences du jugement et du raisonnement, 0 ~ AME

chez les espèces plus voisines de l’homme et mieux servies par leur organisation ; intelligence par conséquent, mais intelligence limitée aux fonctions empiriques, incapable de s’élever à la conception des vérités générales et abstraites ; en d’autres termes, intelligence irrationnelle. On croit enfin que la destinée de l’animal s’accomplit tout entière en cette vie, et qu’il n’y a aucun motif de supposer que Dieu accorde à son ame lümmortalité ; ce qui ne fait pas la moindre difficulté contre la doctrine d’une autre vie pour l’homme. V. Bossuet, Traité de la connaissance de Dieu et de soi-même (5= chapitre : De la différence entre l’homme et la bète), le P. Pardies, Discours de ta connaissance des bêtes ; Boullier, Essai philosophique sur t’áme des bètes : le P. Bougeant, Amusement philosophique sur le langage des bètes ; G. Leroy, Lettres philosophiques’sur Vintettigence et la perfectibilitéë des animaux ; Buffon, Histoire des animaux, passim ; Condillac, Traité des animaux, et, dans un genre tout différent, l’Esprit des bètes, par M. Toussenel, livre qui contient, à côté d’énormes paradoxes, beaucoup de faits et de détails intéressants. N’y aurait-il pas quelque injustice a omettre La Fontaine et šson admirable plaidoyer en faveur de l’intelligence, des bètes ? seul point sur lequel il s’éloigne de la philosophie de Descartes, qu’il admire et auquel il rend cet hommage enthousiaste :

Descartes, ce mortel dont on eût fait un dieu Chez les paiens, et qui tient le milieu. Entre l’homme et l’esprit........

’ Fables, X, 1, Les deux Rats, le Renard et l’0Eu/’

  • B- B.

me ou iuonua. Les Anciens désignaient ainsi une force qui, selon eux, animait et vivifiait tout ; elle servait sa la matière de principe moteur et de principe plastique. Parmi les philosophes, les uns, comme Pythagore, et surtout Platon et les Alexandrins, faisaient consister l’ã.me du monde en une-substance intermédiaire entre le Dieu suprême et l’univers ; d’autres, comme les stoïciens, la substituaient à Dieu lui-même, et aboutissaient ainsi au panthéisme. Presque tous les docteurs de la primitive Église, s’accordant sur les trois hypostases (V. ce mot) platoniques, semblent reconnaître l’âme dans le Saint-Esprit. Au moyen âge, cette doctrine disparaît presque entièrement, pour se montrer de nouveau à l’époque de la Renaissance, d’abord avec le platonisme, et ensuite sous le nom d’archée, ou de prtncípium hylarchicum, dans les doctrines empreintes de mysticisme de Cornélius Agrippa, de Van Helmont et d’autres. - Toutes les doctrines sur l’ame du monde n’étaient que des tentatives faites pour expliquer l’ordre et l’harmonie qui règnent dans la création, et qui révèlent une intelligence infinie. V. Platon, le Timée ; Schelling, l’Ame du monde, in-S", Hambourg, 1809 ; Ch.-Gottl. Schmidt, ’t’Univers et l’Ame rfgagnonda d’après les idées des Anciens, in-8°, Lãipzig, Ama. C’est., dans un instrument a cordes, le petit cylindre de bois placé debout entre la table et le fond, pour maintenir la distance respective de ces parties et établir entre elles des vibrations uniformes ; on le met à peu près au-dessous du pied du chevalet. La beauté des spnsé dépend beaucoup de la manière dont l’àme est p ac e.

Ana ou Noyau, en latin nucleus, terme usîté dans les beaux-arts pour désigner l’ébauche d’une figure qui se fait sur une armature de fer avec du mortier et du plâtre. Anas (Représentation des). Les artistes du moyen âge ont figuré les ames, dans les bas-reliefs et sur les vitraux, tantôt par des colombes, . tantôt par de petites formes humaines, jeunes, souvent drapées, quelquefois nues, nimbées ou auréolées, ayant les bras croisés sur la poitrine ou les mains jointes. En général, l’école byzantine a représenté les ames enveloppées de bandelettes, tandis que les artistes de-l’Italie les représentent nues et sans sexe ; nues, parce qu’après la mort terrestre elles n’ont plus d’enveloppe vicieuse ; sans sèxe, parce que la différence entre l’homme et ia femme ne tient qu’au corps. Quelquefois Dieu le Père, Jésus-Christ, Abraham ou les anges les portent dans une sorte de nappe ou de linceul. Dans les représentations du Jugement dernier, on voit souvent des ames disputées entre des anges et des démons. Ou bien l’archange S’Michel les pèse dans une balance. V. Molanus, Historia imaginum saêrarum, 0

in-4. A -

AMÉBÉE (Chant), en grec amoibaia aoidè ; o.-à-d. chant alternatif (ameibó ; échanger) ; ainsi nommé parce que,