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LE SERVITEUR

Les Blandin avaient succédé à ton père dans l’exploitation de la ferme de la Montée. Il n’apparaissait pas qu’ils s’y fussent enrichis, puisqu’à plus de soixante ans ils travaillaient encore. Ils avaient à verser des redevances, du consentement de l’abbé Petitier, à Mme Camille. Elle ne s’appelait pas que Camille. Ce n’était que son prénom. Il y avait peut-être dans la petite ville dautres femmes qui s’appelaient aussi Camille, mais, elle, c’était une dame importante, veuve depuis longtemps, et riche : son prénom suffisait à la distinguer des autres. Il n’y avait, ici, qu’une Madame Camille.

C’était un peu comme dans l’ancien temps où les poules que tu étais obligé de donner à ton seigneur devaient avoir assez grandi pour pouvoir voler du sol à l’échelle, de l’échelle à la mangeoire et de la mangeoire au perchoir, où ton seigneur acceptait ton avoine pourvu qu’une truie, enfermée trois jours sans nourriture, consentit à s’en nourrir. Allons ! Ton seigneur n’était pas trop exigeant.

C’étaient deux vieilles gens qui peinaient d’un bout à l’autre de l’année, tellement qu’il ne leur restait pas une minute pour se plaindre.