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LE SERVITEUR

de nous ? Les quelques-unes d’entre elles dont on connaisse les noms, n’est-ce pas au hasard qu’elles le doivent, soit qu’une réputation de ridicule s’attache à elles, — partout il faut des comiques et des pitres, — soit qu’une grande bataille ait été livrée non loin d’elles, soit qu’elles aient donné le jour à quelque homme célèbre à qui elles dressent, au bon endroit, une statue, soit qu’un monument classé leur attire des touristes ? Les autres, comme celle où nous vivons, c’est un petit point noir sur la carte. On ne s’occupe pas plus d’elles que de toi. Elles sont la France anonyme, comme toi le peuple anonyme. On les laisse dormir dans le silence et dans l’ombre, comme toi, sans rien soupçonner des richesses que vous recelez. Chaque famille y a son histoire, et chaque maison la sienne ; presque toujours, d’ailleurs, les deux se confondent. Et c’est de toutes ces histoires privées qu’est faite celle de la petite ville. Mais cela ne va pas plus loin, car ce n’est pas des histoires des petites villes qu’est faite l’histoire officielle de la France. Elles n’y apparaissent point, ou que si peu ! Nous ignorons s’il en pourrait être autrement, mais nous