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DU TRADUCTEUR.

encore un peu diminué de cette barbarie de langage, en prenant un milieu entre sa langue et la langue philosophique, aujourd’hui reçue dans toute l’Europe. Car les savans des différentes nations de cette partie du monde, se parlant continuellement les uns aux autres, ils ont nécessairement, aux terminaisons près, un grand nombre de mots communs.

Quant aux mots qu’il a créés, pour désigner avec plus de précision les membres de ses divisions, nous avons cru devoir les respecter ; et lorsqu’ils n’avoient point d’équivalens dans notre langue, nous avons imité sa hardiesse. Lorsqu’un sujet est divisé, par exemple, en quatre membres, si les trois premiers sont exprimés, chacun par un seul mot, c’est violer la loi de l’analogie et de la convenance, que d’employer trois ou quatre mots pour exprimer le quatrième. Il vaut mieux alors forger ce mot, sous condition de ne l’employer que pour cette division, et de se rallier à l’usage dans tout le reste du livre.

C’est surtout en traduisant Bacon, que nous avons senti combien notre langue est pauvre ; et ce qui lui manque le plus, ce sont les substantifs abstraits et les substantifs exprimant l’action, ou plutôt l’acte : ce qui peut venir de ce que les infinitifs actifs ayant fait autrefois la fonction des substantifs de cette dernière espèce, en les dépouil-