Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/171

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La première fois que le vieux Daniel avait vu les fleurs de Marguerite, il les avait jetées brutalement par la fenêtre, en disant à sa nièce qu’elle était folle de mettre des fleurs auprès des malades, que rien n’était plus mauvais pour eux. La pauvre Marguerite en aurait pleuré ! elle avait justement choisi les fleurettes les plus inoffensives, celles qui n’avaient point d’odeur, ou qui en avaient à peine. Et, par le fait, personne ne semblait s’en être mal trouvé ; tout au contraire, à partir du jour où les fleurs eurent disparu par ordre du vieux Daniel, la dépression physique, et morale, si préjudiciable à la guérison des anémies paludéennes, montra une tendance marquée à revenir. Consulté en cachette par Marguerite, le docteur Hugon fit entendre raison à l’oncle féroce, qui se contenta, pour toute vengeance, de lui répondre en bougonnant :

« Oh ! toi ! elle te fait faire tout ce qu’elle veut, cette petite ! Elle te dirait d’avaler une couleuvre grosse comme mon bras, que tu l’avalerais !

— Et avec plaisir encore ! riposta gaîment Hugon.

— Vieille bête, va ! » grommela Daniel entre ses dents, et il sortit furieux.

Ce qui n’empêcha pas, du reste, que cinq minutes plus tard, il n’y pensait plus du tout.

Tout marchait donc le mieux du monde dans la plus confortable et la plus coquette des ambulances. Soignés, dorlotés, gâtés comme peu d’entre eux l’avaient jamais été, malades et convalescents se rétablissaient à vue d’œil. Seul, un des officiers, le plus sérieusement atteint, était toujours dans un état des plus précaires. Depuis son arrivée à Maevasamba, il n’était pas encore sorti de la