Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/277

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« Puisque vous avez donné six mois de votre temps pour soigner des braves garçons qui ne vous étaient de rien, lui dit-elle de sa voix la plus câline, vous pouvez bien en perdre un de plus pour vous reposer et vous consacrer uniquement à votre aimable nièce, monsieur mon très cher oncle. Vos affaires attendront encore un peu, voilà tout. D’abord, vous êtes bien assez riche comme ça, et quand vous gagneriez maintenant un peu moins d’argent, le beau malheur ! »

Le vieux négociant adorait sa nièce et céda, comme aussi le Dr Hugon, que Marguerite retint également, malgré une belle résistance. Les deux hommes avaient d’ailleurs pour rester un excellent prétexte, que la jeune fille ne manqua pas d’invoquer : c’était celui d’aider de leurs conseils et de leur expérience les efforts de Henri, qui, dès la première semaine de son retour, s’était attelé à la rude besogne de rétablir sur ses anciennes bases l’exploitation qui avait tant tenu au cœur de son père. Presque tout était à refaire : les cultures, abandonnées à elles-mêmes pendant près d’une année, étaient retournées à l’état de nature ; quant au personnel, on dut en recruter un nouveau, ce qui n’alla pas sans de grandes difficultés, l’ordre n’étant pas encore rétabli dans la région. Il ne fallut pas moins d’un bon mois pour remettre toutes choses en état de marcher. Quant à la maison d’habitation, minutieusement désinfectée par les soins du Dr Hugon, elle reprit peu à peu son ancienne allure confortable et coquette ; et Marguerite, après s’être montrée six mois durant la plus infatigable des infirmières, redevint l’experte et aimable maîtresse de maison, dont le sourire et la jeunesse égayaient ce laborieux intérieur.