Page:Baillet - De quelques ouvriers-poètes, 1898.djvu/98

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Hier, d’un fléau destructeur
La violence fut extrême :
Tout est grêlé… le percepteur
Assure qu’on paiera quand même.
De par le ciel, de par l’impôt,
Rien dans la huche et rien au pot !

Dodo, mon petiot,
Nous allons faire un long carême.
Dodo, mon petiot,
Garde tes larmes pour tantôt.

Tu jeûneras plus d’une fois…
Lorsque tu reçus l’existence
Tes cinq aînés, qui sont au bois,
Avaient déjà maigre pitance.
Un eût suffit, mais six… hélas !
Guillot, le riche, n’en a pas.

Dodo, mon petiot.
Ta mère en a fait pénitence.
Dodo, mon petiot,
Garde tes larmes pour tantôt.

Hâte-toi de grandir pourtant.
Ton appétit fait du ravage !
Une bêche est là qui t’attend,
Pour apprivoiser ton courage.
L’école !… il n’y faut pas songer.
Avant de lire il faut manger.

Dodo, mon petiot,
Pas de hochets pour ton jeune âge,
Dodo, mon petiot,
Garde tes larmes pour tantôt.

Le bon Dieu qu’il faut adorer,
Bien que parfois sa foudre gronde,
Créa le soleil pour dorer