Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/87

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ne tardérent pas à le tourner en Cartesius. Cette maniere de changer les noms en latin, tant par le retranchement de l’article des langues vulgaires, que par la terminaison éloignée des manieres de les prononcer, étoit assez ordinaire parmi les gens de lettres pour empêcher que personne en fut surpris. Il fut peut-être le seul qui voulut y trouver à redire, jugeant qu’il étoit du devoir d’un enfant de famille de ne pas laisser altérer ou corrompre un nom qui lui auroit été scrupuleusement conservé par ses ancêtres.

Cartesius, selon lui, étoit un nom feint, plus propre à le faire méconnoître des personnes de sa connoissance et à le faire désavouër de ses parens, qu’à le faire connoître à la postérité. L’événement fit voir qu’il avoit encore autre chose à craindre de cette licence de latinizer son nom, puisque quelques-uns de ses ennemis cherchant à lui dire des injures, s’avisérent de l’appeller Cartaceus Philosophus. Mais il falut céder à l’impétuosité de l’usage qui l’emporta sur ses raisonnemens : et il a reconnu lui même dans la suite du temps, que Cartésius a quelque chose de plus doux que Descartes, dans les ecrits latins. Ce qui se trouve aujourd’hui confirmé par ses sectateurs, qui s’appellent même en notre langue cartesiens plus volontiers que descartistes , malgré l’épreuve que M Rohaut et M Clerselier avoient faite de ce dernier nom. Au reste la raison que M Descartes avoit de rejetter le nom latin de Cartesius paroîtra encore plus évidente et plus solide lors qu’on sçaura que l’ancienne orthographe du nom de la famille étoit Des Quartes ; et dans les titres latins du quatorziéme siecle, De Quartis.

Les couches de Madame Descartes qui avoient été assez heureuses pour l’enfant, furent suivies d’une maladie qui l’empêcha de relever. Elle avoit été travaillée dés le temps de sa grossesse d’un mal de poûmon qui lui avoit été causé par quelques déplaisirs qu’on ne nous a point expliquez. Son fils qui nous apprend cette particularité, s’est contenté de nous dire qu’elle mourut peu de jours aprés sa naissance.

Les soins du pére purent bien garantir l’enfant des inconveniens que l’on devoit craindre de la privation des secours de la mére : mais ils ne purent le sauver des infirmitez qui accompagnérent la mauvaise s