Page:Baillon - La Vie est quotidienne, 1929.djvu/197

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uniforme, sans le sergent qui vous guide : « Va par là », sans le copain qui vous parle : « Courage, mon vieux », rien qu’avec son fusil qui est un machin pour se battre, il n’était pas à l’aise, le petit soldat. Son régiment où c’qu’il marchait ? Comment courir après ? Et puis ces Boches !…

Quand on est un bougre de petit soldat, qu’on porte encore sa frimousse de gosse, on ne sait pas grand chose de toutes ces lois de la guerre. Alors les Boches, ceux qu’on appelle l’ennemi, ceux qu’on tue ou qui vous tuent, que feraient-ils quand ils le verraient ? Serait-ce avec leur mitrailleuse ? Serait-ce à coups de baïonnette ? Ils auraient pour le moins, leurs pattes pour l’attraper et l’envoyer prisonnier en Allemagne.

« Sacré ! Sacré !… » Oh ! non, il n’était pas à l’aise le petit soldat. Il montrait cela à sa manière. Dans cette rue où il y avait tant de monde, il pleurait ; il tournait comme un perdu ; il implorait un monsieur, il implorait une dame, peut-être parce que ce monsieur, ou mieux encore cette dame, aurait pu lui dire : « Viens par ici, mon petit, j’ai chez moi un vieux costume ; tu leur glisseras entre les pattes. »