Page:Baillon - La Vie est quotidienne, 1929.djvu/220

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sous une poule qui couve, j’enfonçai ma main dans la terre. Je tâtai au hasard, sentis une très grosse, l’arrachai :

— Tu n’as vu personne ?

— Non, papa.

Je passai au plant suivant.

Au bout d’une demi-heure, j’eus, à ce qu’il me parut, une portion suffisante. Une poche pleine.

— Tu es sûre de n’avoir vu personne ?

— Non, non, papa.

— Alors vite en route.

Pour employer le mot juste : nous décampâmes. Ce n’aurait pas été la première fois que les paysans auraient assommé un maraudeur pour une poignée de leur bien.

Il faut avoir la conscience et la poche bien chargées pour distinguer des pas d’hommes qui courent à deux cents mètres derrière vous. Nous avions pris un chemin de traverse, quand j’entendis ce bruit. Aïe ! Fuir, j’y pensai ; mais comment faire avec une enfant ? Je n’eus du reste pas le temps. Lancés en pleine vitesse, deux grands gaillards me dépassèrent, firent volte-face, se plantèrent devant moi. Ils étaient pieds nus, coiffés de casquettes effrayantes.