Page:Baillon - La Vie est quotidienne, 1929.djvu/99

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s’il ne réussissait pas à retirer le mal que le père Benoît s’était enfoncé dans la jambe.

Un matin, oulla ! oulla ! le père Benoît se traîna comme il put jusque là.

Le berger Joseph ne fut pas long à donner son avis. Il réclama vingt sous. Il dit :

— Les vétérinaires sont des ânes.

Il ajouta :

— Et les médecins aussi.

Ce qui vous tourmentait, Père Benoît, ce n’était pas des rhumatismes. Ce n’était pas non plus, comme on aurait pu le croire, un os. C’était un vent. Ce vent était entré par un trou que le Père Benoît devait s’être fait, sans le savoir, sous l’ongle. Cela arrivait de même quand les brebis s’empêtraient parmi les ronces. De l’ongle, le vent était remonté dans le bras, avait glissé dans le corps et maintenant il attendait son moment pour sortir par la jambe. Il aurait peut-être suffi d’une entaille qui lui eût ouvert le passage. Mais outre qu’une entaille peut empoisonner les sangs, il y avait mieux : donner un autre franc, après quoi le Père Benoît rentrerait chez lui, se choisirait une belle bouse de sa vache, s’en ferait un emplâtre, le collerait sur sa jambe, le garderait pendant huit jours