Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/134

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Pas très grande, des feuilles en métal, des perles, une inscription : À mon Ami. D’avoir voulu pleurer, de ne l’avoir pas pu, mon chagrin s’était durci. Un autre, semblait-il, s’était installé sous mon crâne. Moi, Marcel, j’étais triste. Celui que j’appellerai l’Autre ne l’était pas et n’acceptait pas que je le fusse.

C’est ainsi que dans le tramway, il se mit à dévisager une dame, son vis-à-vis. Pour moi personnellement, cette dame était quelconque. Elle avait la bouche petite, le nez rouge un peu fort : une fraise au-dessus d’une cerise. À peine l’Autre eût-il formulé cette image, qu’il se mit à chercher ce que cette bouche et ce nez avaient de trop et de trop peu pour ressembler totalement à ces fruits. Par exemple, la bouche eût dû être un tantinet plus ronde, la peau des lèvres, plus brillante. Le nez par contre avait quelque chose de la forme, de la couleur et même des pores d’une fraise. Mais on aurait dû y semer quelques-uns de ces grains qui craquent sous la dent, quand on mâche une fraise. De ces grains, je partis vers ceux à peine plus gros de la figue. La figue me mena en plein dans la Provence et la Provence, à mon état actuel de bourrique.

J’enrageais de me disperser ainsi et malgré moi, il m’en venait un sourire, ce que je jugeai