Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/137

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Et je souris aussi. Cette espèce de complicité me dégoûta. D’ailleurs, je n’y pensai pas longtemps. Je savais lourdement que Charles était mort et que… Mais des idées plus légères me venaient : des idées de Gaillac. Midi approchait. Après tout, j’avais tort de traîner dans les rues. J’étais un ami de Charles, un intime. Sa maman serait heureuse de me voir avant les autres. Je la consolerais, je lui dirais… Et puis, et puis, je n’aurais plus à porter ma couronne. Je me mis à marcher vite. Je dépassai avec mépris quelques jeunes gens qui portaient aussi un paquet et étaient ces joueurs de foot-ball qui gâtaient les dimanches de Charles. J’aperçus le coin de sa rue. Je pensai aux deux cerisiers. Et alors tout à coup, oh !… Certes quand il y a un enterrement, il y a des tentures. Je le savais, mais je ne m’y attendais pas. On avait dressé la chapelle à l’extérieur, sans doute parce que, dans la maison, les pièces étaient trop petites. Tout en haut, un grand C, émouvant comme si on l’avait dessiné exprès pour lui. Sur un montant, la lettre. Je la lus comme si je ne la connaissais pas : CHARLES CORBIER… longue et pénible maladie… trois heures précises… Une épingle fixait le tout. Mon cœur se serra. J’entrai. D’une main, je tenais ma couronne, de l’autre mon chapeau. C’était