Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/197

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tapotement des ongles sur les marches, les pas de Jeanne. Elle était comme toujours. C’est-à-dire, elle était comme je la voyais depuis que je l’avais regardée à travers les baisers des deux autres. De plus elle avait lu ma lettre et Dupéché me surveillait, qui voulait que je l’aborde. Le chien qui tirait sur sa laisse l’obligeait à courir. On eût dit qu’une autre force la poussait en avant. Elle vint droit sur moi. Mon cœur sauta. « Me jeter à l’eau, pensai-je, me jeter à… » Sans savoir, je soulevai mon chapeau :

— Mademoiselle… Mademoiselle, excusez-moi. Je me suis permis de vous écrire.

Elle arrêta son chien. Je pensai ridiculement au chauffeur qui donne un coup de frein. Ses joues étaient roses. Elles devinrent rouges.

— En effet, Monsieur, j’ai reçu une lettre, « Mon cher ami » ce n’était pas moi. Je n’ai pas lu plus loin. Je vais vous la rendre.

Elle me parlait ! Elle n’avait pas lu ma lettre ! Dans ma joie, je ne m’assurai pas si Dupéché nous voyait :

— Pas lu, dis-je. Comme je suis content ! Elle me lança un regard où je devinai de la surprise et aussi quelque chose de bon, comme dans l’œil de certaines infirmières ici quand elles ont compassion. Elle