Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/231

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pas. C’était dans une petite ville. Je me présentais comme servante. Alors, je me suis dit : « Comme le mal quand on est mauvaise, on peut, quand on est bonne, faire le bien partout. » Je me suis mise à faire ça.

— Dans la petite ville ?

— Une ville à casernes. Les premiers jours, les recrues sont tristes. On leur disait : « Allez donc chez Nelly. » Ils étaient mes orphelines. Toi sans doute tu seras appelé bientôt ?

— Réformé.

Elle me jugea d’un clin d’œil :

— Oui… je devine. Les civils me méprisaient. Le matin, je balayais les ordures qu’ils déversaient devant ma porte. Un soir il en est venu un. Treize, quatorze ans ; de l’argent plein les poches. Je lui ai dit : « Tu es trop jeune, petit. Va plutôt à confesse. »

« Va à confesse ». Loin, loin, une autre voix avait dit : « Tu n’iras pas à confesse. » J’eus très mal. Je voulus douter encore. Je la tutoyai sans savoir :

— Tu as dit cela, toi ?

— Bien sûr.

— Répète. Qu’as-tu dit ?

— J’ai dit : « Tu es trop jeune. Va plutôt à confesse. » Je ne voulais pas être une mauvaise femme.

« Mauvaise femme ». Mais l’autre alors ! Et ma