Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/249

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— Il agit bien.

— Je t’en supplie, maman !

La nuit, il traversa ma chambre, à trois reprises, en multipliant ses clins d’œil et répétant :

— Ne crains rien ! Tu sais bien que je n’existe pas.

Il était alors deux heures. Je le vérifiai sur ma montre en craquant une allumette. Ma mère, encore une fois, prétend que j’eus le cauchemar. Mais au réveil, je retrouvai l’allumette à la place où je l’avais déposée.

Au moment de partir, maman me bourra de recommandations : d’être calme, de ne pas boire, de… Ainsi, une fois déjà, elle m’avait embarrassé avec une couronne. Cela me troubla : je me trompai de métro. Quand j’arrivai au rendez-vous, Jeanne m’attendait depuis une demi-heure. Elle avait une de ces robes comme on en porte, faite d’une pincée de soie qui, sous le vent, ondulait sur son corps comme une eau bleue. La voir me donna froid. Je m’excusai.

— Mais non, je n’ai pas eu froid.

Qu’elle ne se plaignît pas, me peina davantage. Le dîner avait lieu dans un restaurant près du Bois. Nous prîmes un taxi. Pendant le trajet, je conservai dans ma main, la main de Jeanne. De temps en temps, je la pressais. Elle