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Page:Bainville - Bismarck.djvu/94

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Il est inconcevable, me dit le prince, qu’on puisse laisser à Berlin un homme qui passe son temps à conspirer contre le gouvernement impérial avec les Polonais, les, ultramontains et autres ennemis de l’Empire[1].

…L’empereur rend difficile la conduite de la politique avec la France. Sous l’influence de Gontaut, il s’en tient toujours à la soi-disant solidarité des intérêts conservateurs, la vieille politique d’Arnim, au lieu de voir que la France reste incapable d’alliance et divisée… Le chancelier dit encore que ce serait une prétention un peu trop forte que de vouloir lui faire croire que l’impératrice ne s’occupe pas de politique et n’intrigue pas contre lui. Depuis quinze ans, il trouve partout l’impératrice en adversaire. Elle se fait adresser des correspondances qu’elle lit à l’empereur au déjeuner, et c’est toujours après le déjeuner que le chancelier reçoit de l’empereur des billets désagréables. L’empereur approuve en principe sa politique religieuse, mais il fait des difficultés sur le détail, et l’ingérence de l’impératrice en est la cause. Schleinitz, Goltz, Nesselrode et d’autres travaillent contre Bismarck avec l’impératrice… Tout ce qui est ennemi du gouvernement impérial est soutenu par elle. Et tant que Gontaut-Biron sera à Berlin, il y aura une sorte de contre-ministère avec lequel le chancelier aura à combattre.

Derechef, le prince de Hohenlohe fut chargé du rôle d’intermédiaire entre Bismarck et l’empereur Guillaume. Cette fois, il devait expliquer et défendre devant le souverain la politique bismarckienne :

  1. Ce sont, au témoignage du duc de Broglie, les termes mêmes des plaintes que Hohenlohe apportait au quai d’Orsay contre M. de Gontaut. En outre, on sait que le véritable texte des célèbres menaces de Bismarck en 1875 est celui-ci : « Si la France soutient les catholiques en Allemagne, je n’attendrai pas qu’elle soit prête. Elle le sera dans deux ans : je saisirai auparavant l’occasion favorable. » On oublie d’ordinaire le premier membre de phrase, et l’on fait dire à Bismarck : « Je n’attendrai pas que la France soit prête etc…»