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Page:Bainville - Histoire de deux peuples.djvu/43

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HISTOIRE DE DEUX PEUPLES

libertés germaniques. Le duc de Bouillon fut chargé de porter à Paris leur demande. Mais bien des choses avaient changé depuis la mort d’Henri IV. Dans les grands désordres qui l’avaient suivie, les principes directeurs de la politique française avaient été perdus de vue, un rapprochement, sanctionné par le mariage de Louis XIII, s’était fait avec l’Autriche. L’empereur Ferdinand ne manqua pas de saisir une occasion si favorable. En même temps que les protestants envoyaient leurs délégués à la cour de France, il y dépêcha un ambassadeur, Friedenbourg, chargé de plaider que la cause du roi et la cause de l’empereur étaient la même. Les arguments que développait Friedenbourg étaient d’une modernité singulière. Le porte-parole de Ferdinand II représentait à Louis XIII et à Luynes qu’avec la révolte de l’Électeur Palatin il s’agissait d’une conjuration républicaine, que, de toutes les républiques, villes libres, aristocraties et démocraties protestantes, naissait un mouvement qui menaçait au même titre toutes les monarchies. De Suisse, de Hollande, des cités hanséatiques, il montrait la révolution gagnant de proche en proche, ralliant même celles des villes catholiques d’Allemagne où régnait « le gouvernement de plusieurs ». Et, très adroitement, Friedenbourg invitait le roi de France à faire un retour sur ses propres protestants, en état ou en velléité d’insurrection perpétuelle, à la fois républicains et séparatistes, si dangereux pour l’autorité du monarque et l’unité du royaume. « Que prétendent-ils donc, eux aussi ? s’écriait l’habile diplomate. N’ont-ils pas ensemblement conspiré, fait des assemblées secrètes et collectes de deniers afin d’ébranler s’ils pouvaient le royaume de France et rendre la puissance des rois énervée ? » Si Louis XIII intervenait en faveur des protestants d’Allemagne, il encouragerait ses huguenots, il ne pourrait plus en venir à bout. « Qui défend les rebelles, il apprend à ses propres sujets à se révolter. Qui prête l’oreille aux étrangers qui calomnient leur magistrat (leur gouvernement), il ouvre la porte aux séditions intestines, et si vous portez secours aux rebelles contre leur roi, quand ils