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Page:Bainville Les conséquences politiques de la paix 1920.djvu/40

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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

Kœnigsberg fût soudé au reste du royaume, que le corridor polonais fût fermé. Et le traité de Versailles a rétabli l’îlot de la Prusse orientale en laissant subsister une grande Prusse­-Allemagne ! Nous examinerons, au chapitre sui­vant, les effets psychologiques et politiques de cette demi-mesure si gravement inconsidérée.

On ne peut donc pas dire que le traité ne dé­membre pas l’Allemagne. Il la démembre net­tement à l’Est, à un point sensible, très loin de la prise des Alliés. Il la démembre au profit de la Pologne, trois fois moins peuplée qu’elle et plus de vingt fois moins forte si l’on tient compte des faiblesses intimes de l’État polonais et des périls qu’il court. Regardez encore cette carte si parlante. Accroupie au milieu de l’Eu­rope comme un animal méchant, l’Allemagne n’a qu’une griffe à étendre pour réunir de nou­veau l’îlot de Kœnigsberg. Dans ce signe, les prochains malheurs de la Pologne et de l’Europe sont inscrits.

À l’extrême rigueur, il pouvait être admis que, sur le flanc occidental, l’unité allemande, tenue en respect par la France, par la Belgique, et, au loin, par la garantie anglo-américaine, ne serait plus dangereuse ou que le danger serait faible, incertain, qu’il serait facile de le con­jurer. Peut-être. L’expérience était pourtant bien dangereuse, car, à cette Allemagne, toujours apte à redevenir un puissant État, nous avons tant de charges, tant d’obligations, à im­poser qu’elle supportera impatiemment ! Mais