Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/142

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pour ainsi dire matériels, constitutifs de la religion, moins sans doute son côté idéal, celui même, qui doit la détruire, tôt ou tard — la pensée. En effet, quelle est l’essence réelle de toute religion ? C’est précisément ce sentiment d’absolue dépendance de l’individu passager vis-à-vis l’éternelle et omnipotente nature.

Il nous est difficile d’observer ce sentiment et d’en analyser toutes les manifestations dans les animaux d’espèces inférieures ; pourtant nous pouvons dire que l’instinct de conservation, qu’on retrouve jusque dans les organisations relativement les plus pauvres, sans doute à un moindre degré que dans les organisations supérieures, n’est rien qu’une sorte de sagesse coutumière qui se forme en chacune sous l’influence de ce sentiment qui n’est autre, avons-nous dit, que le sentiment religieux. Dans les animaux doués d’une organisation plus complète et qui se rapprochent davantage de l’homme, il se manifeste d’une manière beaucoup plus sensible pour nous, dans la peur instinctive et panique, par exemple, qui s’empare d’eux quelquefois à l’approche de quelque grande catastrophe naturelle, tels qu’un tremblement de terre, un incendie de forêts ou une forte tempête. Et en général, on peut dire, que la peur est un des sentiments prédominants dans la vie animale. Tous les animaux vivants en liberté sont farouches, ce qui prouve qu’ils vivent dans une peur instinctive, incessante,